Crevettes, scampis ou gambas ont longtemps été des mets rares, raffinés et chers. Mais de nos jours, leur consommation a explosé : dans le monde, on estime qu’en 2023, environ 6 millions de tonnes de crevettes seront consommées par an ! En 20 ans, la production aurait été multipliée par 9. Un boum qui fait des dégâts sur la biodiversité.
La crevette est le produit de la mer qui fait le plus de kilomètres avant d’arriver dans nos assiettes : elles viennent pour la plupart de Chine, Thaïlande, Indonésie, Inde, Viêtnam, Brésil, Equateur ou encore du Bangladesh. Plus de la moitié des crevettes consommées de nos jours proviennent de fermes d’aquaculture. Le reste est pêché en mer. Deux types de production qui ont chacune des conséquences néfastes sur la biodiversité.
Comme pour beaucoup d’autres produits de la mer, la crevette est victime de la surpêche. Selon le WWF, seules quelques zones situées en Australie et au Mexique feraient exception en appliquant une pêche respectant les seuils de renouvellement des espèces. La pêche au chalut de crevettes est également celle qui entraine le plus de prises accessoires : jusqu’à dix kilos de poissons, tortues et autres prises « annexes » pour un kilo de crevettes pêchées dans les zones tropicales. Les filets raclant le sol, cette pêche occasionne d’énormes dégâts sur les écosystèmes des fonds marins.

Les dommages de l’élevage de crevettes sont aussi multiples. Les fermes sont situées en bord de mer et peuvent mener à la destruction d’écosystèmes très riches : estuaires, prés-salés, marais ou mangroves. Ces écosystèmes jouent un rôle vital pour la faune terrestre et marine : ils sont un lieu essentiel de reproduction, d’alimentation et de migration pour de nombreuses espèces de poissons, crustacés et d’oiseaux. Si la production de crevettes n’est pas la seule responsable, on estime qu’elle est un facteur important de disparition des mangroves. A l’échelle mondiale, la FAO estime une perte de 26 % des surfaces de mangroves depuis 1980. Pour l’Amérique du Sud, ce taux serait de 50 % et pour Singapour plus de 80 % !
L’aquaculture de crevettes est aussi source de pollution du milieu marin et des nappes phréatiques des terres agricoles avoisinantes. Enfin, la densité des populations de crevette d’élevage et leur pauvreté génétique favorisent la propagation de maladies, y compris vers les crustacés sauvages.
Un bien triste constat quand on est fin gourmet. Il est donc préférable de limiter sa consommation de crevettes, petites ou grandes, qui doivent rester un plat exceptionnel. Privilégiez les crevettes labellisées (depuis peu) de l’Aquaculture Stewardship Council et MSC, et dégustez des fruits de mer locaux lorsque vous avez l’occasion d’une escapade à la mer, où que ce soit dans le monde.
